Parmi les populations monastiques, on trouve des moines et des moniales, mais aussi des domestiques, des oblats (enfants donnés au monastère pour devenir moines), des novices et, à partir des 11e-12e siècles, des convers.
Les monastères accueillent tout d’abord de nombreux domestiques, des laïcs ayant pour triple fonction d’aider les moines (tâches ménagères et artisanales), de servir leurs hôtes et de gérer le patrimoine du monastère. Selon leur statut, ces serviteurs vivent dans le monastère, à la limite de celui-ci ou encore dans ses exploitations rurales. L’abbaye bénédictine de Petersborough, en Angleterre, compte ainsi une cinquantaine de domestiques au milieu du 15e siècle et 114 au début du 16e siècle.
À l’intérieur de la clôture monastique elle-même, plusieurs types de religieux cohabitent. Dans les premiers siècles du Moyen Âge, la plupart des moines le deviennent avant la puberté, après avoir été offerts très jeunes au monastère par leur famille : ce sont des oblats. Considérés comme spirituellement inférieurs aux adultes, ces enfants occupent une position subalterne. À Cluny, on leur assigne un secteur précis du dortoir commun où ils se reposent entourés de leur maître.
À partir du 11e siècle, l’âge de la profession est repoussé à 18 ou 20 ans et les oblats disparaissent. Cependant, des enfants sont toujours envoyés dans les monastères par leurs familles, à des fins d’éducation. Quant aux novices, religieux n’ayant pas encore prononcé de vœux définitifs, des espaces spécifiques peuvent leur être réservés. Chez les cisterciens, ils s’essaient à la vie de prière, de lecture et de travail sous l’autorité d’un « maître des novices », qui doit s’assurer qu’ils « cherchent vraiment Dieu » avant de prendre l’habit.
La communauté monastique est également ordonnée selon des principes hiérarchiques stricts, mis en œuvre lors des déplacements collectifs comme à l’intérieur des bâtiments communautaires (église, réfectoire et salle capitulaireSalle capitulaire (ou salle du chapitre) : dans une abbaye, lieu où se réunit quotidiennement la communauté religieuse.) où chacun a sa place.
Dans les ordres nés aux 11e-12e siècles (cisterciens, chartreux), une nouvelle catégorie de religieux apparaît enfin : les convers. Les travaux les plus pénibles leur sont confiés afin que les moines respectent plus strictement la clôture et se consacrent pleinement à la prière et au travail intellectuel.
Les convers ont un habit différent des moines et des devoirs liturgiques propres. Dans l’ordre cistercien, leurs temps de prière sont réduits au strict minimum afin d’augmenter leur temps de travail.
Ils vivent soit dans les exploitations du monastère (granges), soit dans des quartiers séparés mais situés à l’intérieur de la clôture. À Cîteaux, Clairvaux, Pontigny, Byland, Kirkstall ou encore Beaulieu, la ségrégation entre convers et moines se manifeste par la distance séparant leurs bâtiments du cloître.
Cette séparation conduit parfois à un quasi dédoublement de la structure claustrale. Au début du 18e siècle, le plan de Clairvaux de dom Milley montre la séparation entre l’espace réservé aux moines et celui dévolu aux convers qui ont leur chapelle, leur salle du chapitre, leur salle commune et leur infirmerie.
Enfin, ces distinctions, formulées dans les règles et coutumiers, ne doivent pas faire oublier que les stratifications sociales persistent bien souvent à l’intérieur du monastère. En effet, en dépit de leurs vœux, les religieux ne renoncent la plupart du temps ni à leurs liens familiaux ni à leur position sociale d’origine. Ainsi, le concile de Trente (1545-1563) tente d’empêcher la cohabitation de religieuses d’une même famille au sein de cellules familiales, sans succès. Et aux 16e-17e siècles, dans le couvent des cisterciennes de Santa Ana d’Avila, en Espagne, les religieuses aisées logent dans des appartements comptant jusqu’à sept pièces et disposent de domestiques personnelles.